Prison de Réau, le 4 décembre, concert pour les femmes : réactions à chaud !

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Le 4 décembre 2014 : 1er concert du duo « Ravie » au Centre de détention Sud-Francilien, à Réau, près de Melun.
Avec Pierre Durand (guitare), Marine Bercot (voix), Nicolas Dufournet (son).

Départ de Pigalle à 10h pour Pierre Durand et moi, une bonne heure et demi de route jusqu’à « Réau Bourg » et là, pas la moindre pancarte indiquant la prison… Je demande à la patronne d’un café qui donne pas envie de boire un café et elle me répond « oh la la j’peux pas vous expliquer, c’est trop compliqué… » Beau démarrage. Déjà 50 mn de retard. J’arrache à la dame des indications en mode « ce sera beaucoup plus long mais au moins c’est plus facile à expliquer » et je tâche de retenir quand à gauche le Mac Do, quand à droite un Dia, combien de mètres entre chaque feu, bref on s’en sort au final avec 1h30 de retard.

C’est là que Nicolas Dufournet m’appelle, il est à « Réau Bourg »… il ne voit pas de panneau… Allez ! on repart de zéro, à moi d’expliquer le Mac Do, le Dia, le resto « La mare au diable », le mirador… avec le téléphone qui n’arrête pas de couper, y’a pas de réseau à Réau… 45 minutes plus tard, le voilà avec une son sourire en coin et une tonne de matériel enfourné dans sa twingo.

Cartes d’identités, portables et clés usb confisqués, tout le matériel de sonorisation passé au laser,  1 sas et 8 portes à franchir, 3 cours à traverser (tout ça a encore pris une bonne heure…) et on arrive enfin dans le fameux gymnase de 40m sur 20, fait pour tout sauf pour jouer de la musique amplifiée, mais putain on est contents d’être là. On voulait le faire, that is it ! Où jouer ? Devant quel gigantesque mur ? Nico choisit un mur sans barreaux et on installe tout en quatrième vitesse pendant qu’une équipe de choc de la Croix-Rouge prépare du café et installe le buffet autour duquel nous rencontrerons les détenues après le concert. Installation terminée. Tout a l’air de marcher. On fait une pause café avant d’attaquer la balance, histoire de se réchauffer (ben oui il faisait froid là-dedans au bout d’un moment…) et là, lever de rideau, ils font entrer les détenues. Bon… ben pas de balance alors 🙂  Conditions brut de chez brut. Go !

Aujourd’hui on joue pour les détenues Femmes, car après un incident dernièrement, les concerts ne sont plus mixtes. Dans le public, il y a aussi les bénévoles de la Croix-Rouge et des surveillants de la prison. Pierre commence à jouer, je commence à bouger, éclats de rire d’un groupe de filles au premier rang. Mélange de joie, de gêne et de surprise… De la musique vivante, les mouvements de mon corps, les grimaces de Pierre, l’impact de la stomp, les boucles hypnotiques, tout ça mélangé à leur quotidien créé de la Vie tout de suite : des éclats de rire répétés, des commentaires fort au milieu des chansons, ça créé une atmosphère saine et vivante, des situations drôles dont je me nourris pendant 1h pour leur donner tout ce que je peux.  Comme images, comme rêves, comme idées nouvelles…

En prison, forcément, chaque phrase prend un sens particulier…  chaque mot est passé au laser, pesé, éprouvé… Y a intérêt à savoir ce qu’on dit. Sur deux chansons, je suis allée les faire chanter. Elles avaient envie, elles étaient gênées.. Elles ont chanté, tapé dans les mains. C’était un beau moment.

A la fin du concert, une détenue (Lydia) a demandé à venir sur scène. Elle a chanté a capella un morceau de Bill Withers puis « We are the world »… Une fille a félicité Pierre avec une admiration non dissimulée et est venue me dire les 4 chansons (les 4 histoires en fait…) qu’elle avait le plus aimé. Je n’en revenais pas de  l’attention aigüe portée aux textes. On sentait qu’elles avaient tout entendu et qu’elles s’étaient nourris des textes et de la musique comme  nous on s’était nourris de leur présence et de leurs réactions à chaud. Là d’accord, c’est un échange.

Après, on a pu discuter avec ces femmes jeunes et moins jeunes autour du buffet installé par la Croix-Rouge dans un autre coin du gymnase. Autre temps fort. Pierre, Nicolas et moi, on a été impressionnés par leur vitalité, leur énergie, leur envie, leurs mines souriantes et leurs cervelles bien plantées. En fait je crois qu’on s’attendait à parler à des femmes déprimées. C’était pas du tout ça. Elles m’ont posé des questions sur l’écriture, l’inspiration, sur mon parcours, les moyens que j’allais mettre en oeuvre pour diffuser mon nouvel album, bref les mêmes échanges qu’on pourrait avoir avec des gens pas enfermés.

Heure du retour en cellule pour les filles. Il est 16h. Nous on est déjà en train de plier. Une détenue s’échappe du rang gentiment et cours vers moi pour venir me faire un gros câlin… Sous le regard amusé et ravi de ses copines. Elle m’a fait un joli cadeau. Je garderai en mémoire ce contact physique débordant de force et de vérité.

Photo volée sur le parking (parce que c’est interdit, même dehors, dis donc…) et puis voilà.Well done comme dit Pierre. On est heureux tous les trois. C’est le 1er concert RAVIE !

 

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